Huit manuscrits médiévaux de l'Edda de Snorri nous sont parvenus. Aucun n'est complet, et chacun présente des variantes. Il en existe quatre principaux.

GKS 2367 4to 1rLa premier feuillet (recto) du Codex Regius.
Stofnun Árna Magnússonar, Reykjavík.

Le Codex Regius (cote GKS 2367 4to) a été rédigé dans la première moitié du XIVe siècle. Il est le plus complet des quatre manuscrits. Seul manque un feuillet, et donc le début du prologue. C'est pourquoi il sert de base aux éditions et aux traductions de l'Edda. Son nom provient de sa conservation pendant plusieurs siècles à la bibliothèque royale du Danemark. Il a été restitué à l'Islande en 1985, et est aujourd'hui conservé par l'Institut Árni Magnússon de Reykjavík.

Le Codex Trajectinus (cote Traj 1374) a été rédigé vers 1595. Il s'agit d'une copie sur papier d'un manuscrit qui aurait été composé dans la seconde moitié du XIIIe siècle. Il présente un texte très proche de celui du Codex Regius. Le début du prologue et la fin du Háttatal sont manquants. Il est conservé à la bibliothèque de l'université d'Utrecht.

Le Codex Wormianus (cote AM 242 fol) a été rédigé au milieu du XIVe siècle. Moins complet (des pages des Skáldskaparmál et du Háttatal ont été perdues, et il ne comprend pas les þulur), il présente notamment une version du prologue qu'allongent des interpolations. Il fait toujours partie de la Collection arnamagnéenne à Copenhague.

Le Codex Upsaliensis (cote DG 11), composé dans le premier quart du XIVe siècle, est le plus ancien. Il présente d'importantes variantes par rapport aux autres manuscrits, tant en terme d'organisation que de contenu, modifié, raccourci (parfois jusqu'à être rendu incompréhensible) ou supprimé (n'y figurent pas, par exemple, les longues citations de la Haustlöng, de la Þórsdrápa, de la Ragnarsdrápa, ni les þulur).  Il est conservé à la bibliothèque de l'université d'Uppsala.

Quatre autres manuscrits médiévaux contiennent des fragments de l'Edda, principalement des Skáldskaparmál, accompagnés de þulur. Il s'agit des manuscrits AM 748 I b 4to (premier quart du XIVe siècle), AM 748 II 4to (vers 1400), AM 757 a 4to (vers 1400) et AM 756 4to (XVe siècle).

Il existe aussi de nombreux manuscrits post-médiévaux. Dérivés des manuscrits médiévaux, il permettent de reconstituer certaines lacunes (ainsi du début du prologue dans le Codex Regius).

La question du manuscrit le plus proche de l'oeuvre de Snorri demeure non résolue. Le Codex Upsaliensis a pour lui d'être le plus ancien (bien qu'il ait été écrit plus d'un demi-siècle après la mort de Snorri) et de contenir des éléments en lien avec Snorri (Skáldatal, généalogie des Sturlungar, liste des lögsögumenn). D'un autre côté, le Codex Regius et le Codex Trajectinus sont perçus comme plus aboutis et plus cohérents, d'où l'idée que le Codex Upsalienis pourrait dériver d'un brouillon, d'éléments disposés de façon disparate, dont le Codex Regius serait une version réarrangée et complétée. Concluant qu'il est impossible de trancher le débat, Anthony Faulkes, éditeur de l'Edda, conclut qu'« it seems best to admit that the manuscripts preserve various compilations based on the lost work of Snorri Sturluson, each of which has its own interest and value1».


1 Faulkes, Anthony. Introduction de : Snorri Sturluson. Edda : prologue and Gylfaginning. Ed. by Anthony Faulkes. 2nd ed. London : Viking Society for Northern Research ; University College London, 2005. P. xxx.